Jimmy Humery
Avant-propos :
L’après-midi théâtrale et de débat organisée par le Collectif Lillois de Psychanalyse autour de la « Queer psychanalyse » n’aurait pu faire événement si elle n’avait été suivie par un public nombreux et attentif. Par sa présence silencieuse mais active, ses réactions bruyantes mais décisives, ses prises de paroles économes mais particulièrement éclairantes, il l’a non seulement rendue possible mais aussi orientée dans ses délinéaments imprévus. Aussi, nous avons souhaité que nos prolongements théoriques d’après-coup organisés en série soient ponctués par les témoignages uniques en leur genre des spectateurs. Après "Pattern austère" de David Deneufgermain, nous vous proposons ce second témoignage, de Jimmy Humery.
Quand l'art sait dire, la psychanalyse à l'épreuve de l'hybridité
Jimmy Humery
Une lumière jaunâtre, une odeur de poussière, le cliquetis d'une vieille horloge, la psychanalyse sent le vieux. À l'époque où l'immédiateté se pose comme un besoin vital, son discours semble devenu anachronique, hors du temps, incongru. Pourtant, elle persiste à vouloir révéler ce que le discours actuel tente de dissimuler de toutes ses forces, l'entre-deux, l'arrière-plan, l'illusoire, mais pas que. En réalité sa présence n'a jamais été aussi nécessaire. Mais c'est que la vieille dame peine à se faire entendre. Les querelles de clochers n’arrangent pas ses affaires en générant partout des postures caricaturales qui éloignent ses auditeurs.
Si seulement son discours pouvait prendre les atours de la modernité sans en payer le prix de sa substance ! Si seulement son discours pouvait dépasser une idéologie arc-boutée sur des concepts à réinterroger à la lumière des problématiques nouvelles !
Possible ? C'est un grand oui ! Voilà la mission largement réussie du Collectif Lillois de Psychanalyse à travers les différentes manifestations proposées et notamment l'événement du 15 avril dernier, "Queer psychanalyse", titre de l’ouvrage de l’invité et commentateur, philosophe et psychanalyste, Fabrice BOURLEZ.
Un lieu, le théâtre Ronny Coutteure à Fretin, une scène au décor sculpté, le jeu de deux comédiens porté par des dialogues ciselés et scandés par les commentaires éclairant des membres du Collectif Lillois de Psychanalyse sous la forme d’arrêts sur image, et tac, vous avez la profondeur du propos.
Raisonner oui mais avec la vibration c'est mieux. Et alors là vous êtes servi. En convoquant Althusser, Foucault, Butler, via une mise en scène millimétrée, le moindre détail est un message dont ladite vibration parviendra jusqu'à vous, sonnant, là aussi, comme une véritable entreprise de déconstruction. Pourquoi ? Parce qu’au-delà de la performance, c’est la performativité qui est visée, et si l'acte au sens analytique produit un point de bascule, le programme du Collectif Lillois de Psychanalyse constitue autant de répliques sismiques qui génèrent le mouvement. Il y a un avant et un après, attention ! Vous ne sortirez pas indemne.
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